5 mots qu’on utilise tous les jours et qui, pourtant, n’existent pasTemps de lecture estimé à 6 minutes

Tous les jours, nous parlons et nous écrivons. Nous nous exprimons dans une langue que nous disons être le français. Pourtant, certains des mots que nous utilisons n’existent pas.

Du moins, ils n’existent pas officiellement.

Aujourd’hui, je voudrais donc vous présenter 5 mots que nous utilisons tous les jours et qui, pourtant, n’existent pas dans la langue française.

 

Si vous avez lu Écrire une nouvelle en 7 jours, certains de ces mots ne vous seront pas inconnus. Je les cite dans la partie dédiée à la correction de la forme. Car, même s’ils sont acceptés dans le langage courant et parlé, ainsi que dans le langage commercial, il n’en va pas de même pour les romans. Certains de ces mots utilisés dans les médias ou le marketing n’ont pas toujours leur place dans les livres.

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1. Impacter

Probablement celui que j’entends le plus souvent, impacter est utilisé le plus souvent dans le sens de avoir un impact, une conséquence sur quelque chose ou quelqu’un. Il prend parfois la signification de entrer en collision, heurter.

Ce verbe est qualifié de familier par Larousse et son utilisation est désapprouvée par l’Académie française. Impacter ne se trouve même pas dans la base de donnée du CNRTL.

Ce n’est pas sans raison : impacter est un emprunt direct à l’anglais. Il s’agit de la francisation du verbe to impact qui peut se traduire par affecter, influencer, heurter (physiquement).

Dans vos romans, il est conseillé de le remplacer par :

  • affecter, influencer, avoir un impact sur quand il est utilisé au sens figuré ;
  • heurter, entrer en collision (parce que collisionner, n’existe pas non plus), percuter quand il est utilisé au sens littéral.

 

D’ailleurs, lorsqu’il y a un impact, il y a aussi, en général des conséquence…

 

2. Conséquent

Belle transition, n’est-ce pas ? 😉

Contrairement à impacter, conséquent est un mot qui existe dans notre dictionnaire depuis des lustres mais pas dans le sens dans lequel il est employé au quotidien. Tous les jours, il est utilisé pour exprimer la notion de grande quantité. En vérité, conséquent regroupe bien des notions, mais pas celle-là.

En français, on peut parler d’une personne conséquente pour dire que cette personne agit de manière raisonnée. Parce que ses pensées sont conséquentes les unes aux autres, c’est-à-dire ses pensées se suivent de manière logique.

Quelque chose de conséquent, c’est quelque chose qui est une conséquence logique d’une autre chose.

Le sens en grande quantité accordé à cet adjectif lui vient d’un vieil usage mercantile. En effet, aux XVIIe et XVIIIe siècles, conséquent était un terme commercial dédié à qualifier un bien de grande valeur.
Pourtant, Claude Duneton, historien français du langage, explique dans un excellent article écrit pour Le Figaro Littéraire que l’utilisation de conséquent dans le sens de considérable comme étant un barbarisme est arbitraire.

À vous donc de choisir votre camp…

 

3. Digital

Celui-ci aussi est dans le dictionnaire depuis que le français existe, mais son véritable sens semble avoir été totalement oublié.

En effet, en français, digital qualifie tout ce qui en rapport avec les doigts.

À l’instar de impacter, digital dans le sens de numérique est un anglicisme. En anglais, digital signifie numérique, qui a un rapport avec les chiffres.

Pourtant, le mot anglais a la même origine que le mot français : digitus qui, en latin, signifie doigt. Si le sens diffère entre les deux langues, c’est parce que les romains comptaient sur leurs doigts et que c’est cette interprétation-là que les anglo-saxons ont gardée au fil des siècles. D’ailleurs, en anglais, digit veut dire chiffre.

Dans vos romans, il est conseillé de remplacer digital par numérique. Sauf si vous parlez bien de choses qui ont un rapport avec les doigts.

En conclusion, nous pouvons donc en déduire qu’un spécialiste en marketing digital est, en réalité, un vendeur de doigts !

 

4. Malaisant

Je croise ce mot de plus en plus souvent alors qu’il n’existe pas. Et ça va même plus loin qu’impacter qui lui est repris dans certains dictionnaires alors que malaisant ne l’est pas.

Malaisant signifie qui provoque le malaise. Officiellement, il apparaît pour la première fois en 1995 dans une critique de film écrite par Didier Péron.

Toutefois, certaines sources ont attesté l’existence de ce mot au XIVe siècle : malaisant serait un mot courant dans un patois du centre de la France.

Néanmoins, même si ce mot n’existe pas (encore ?), les néologismes sont courants pour adapter le langage à nos ressentis et à l’évolution de la vie.

Tout comme avec conséquent, c’est à vous de choisir si vous souhaitez participer à l’insertion d’un nouveau mot dans notre langue ou si, au contraire, vous préférez rester dans les règles.

Si vous ne souhaitez pas ou plus utiliser malaisant dans vos romans, il est conseillé de le remplacer par gênant, dérangeant, tourmentant, qui met mal à l’aise, qui provoque le malaise.

 

5. Efficient

Parfois, les anglicismes peuvent être justifiés par le fait qu’il n’existe pas de mot dans notre langue pour désigner une chose particulière. Par exemple, nous n’avons jamais eu de mot français pour parler d’un sandwich, nous avons donc dû le récupérer aux anglophones. C’est ce que l’on appelle un emprunt en linguistique.

Or, efficient est un anglicisme pur souche qui n’a aucune raison d’être en français puisque nous avons un mot qui le traduit parfaitement et qui est efficace ou compétent ou opérationnel, cela dépend du contexte.

Sauf, si vous l’utiliser dans le cadre de la philosophie. Auquel cas, vous parlerez de cause efficiente pour parler d’une action qui produit un effet.

 

Quelques liens pour terminer

Si vous êtes curieux ou curieuses, je vous mets ici quelques liens si vous souhaitez aller plus loin dans les explications à propos de certains mots donnés plus haut.

Impacter :

Conséquent :

Digital :

Malaisant :

Efficient :

 

Alors, dites-moi, lequel de ces mots utilisez-vous le plus souvent ? Comptez-vous continuer à l’utiliser ?

5 mots qu’on utilise tous les jours et qui, pourtant, n’existent pas
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5 avis sur « 5 mots qu’on utilise tous les jours et qui, pourtant, n’existent pas »

  • 26/04/2021 à 16:17
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    À jeunesse a résumé après les triché j’aimerais savoir s’il y en a des applications tu peux me laisser acajou à la communication français et j’attends votre mail

  • 19/12/2020 à 18:17
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    J’ai conscience de publier un commentaire sur un article vieux de plus d’un an, mais cela me permettra au moins de coucher mes réflexions par écrit.

    « Impacter »: J’apprécie une nuance d’effet « direct » même si, dans la pratique, les synonymes cités dans l’article feraient l’affaire. Je doute également que tous voient la même nuance que moi. Je note que le verbe « to impact » ainsi que le mot français « impact » partagent la même racine latine: « impingere ». Il semble par ailleurs vraisemblable que ce mot ai été transmis du latin à la langue de Shakespeare, à l’instar de presque 30% de vocabulaire anglophone, par l’entremise du Vieux Normand. Ainsi, loin d’être un anglicisme « pur jus », « impacter » me paraît trouver naturellement sa place en remplacement de « avoir un impact sur », ce que suggère son adoption grandissante par les locuteurs francophones.

    « Conséquent »: Je partage parfaitement l’avis de Claude Duneton au sujet du « nouveau » sens du mot, sens qui partage une claire familiarité avec ceux déjà consacrés. Si permettre aux mots existants d’évoluer dans leur signification ou d’en acquérir de nouvelles est un barbarisme, comment notre langue pourrait-elle faire face à l’évolution rapide de notre monde?

    « Digital »: C’est, de cette liste de cinq mots, celui qui me paraît le moins pertinent en effet. Je note que, selon le Larousse, « [le terme] tend déjà à vieillir » et à se voir remplacer par « numérique » et ses dérivés.

    « Malaisant »: Cette réémergence d’un mot tombé en perdition est fantastique. Il répond clairement à un besoin des locuteurs, est facile à interpréter et d’origine francophone: que demander de plus?

    « Efficient »: De loin le « nouveau » mot le plus intéressant de la liste! L’auteur de l’article propose ici de le remplacer, notamment, par « efficace ». Une rapide recherche lui aurait démontré que « efficient » ne peut pas se traduire par ce terme, ni ses synonymes. Mieux encore, le terme « effective », qui lui se traduit par « efficace », n’est pas synonyme de « efficient »! Il est vrai que les anglophones eux-mêmes confondent parfois l’usage de ces deux mots. Cependant, là où « effective » décrit le fait d’avoir un effet, « efficiency » exprime le degré d’optimisation de l’efficacité.

    Exemple: la solution A ainsi que la solution B produisent l’effet C, sans autres conséquences notables. Toutefois, pour une unité de solution A, l’effet est de 40% alors que pour une unité de solution B, l’effet est de 75%. On dira ici que la solution B est la plus « efficiente » car produisant l’effet escompté en utilisant moins de ressources notamment. Ainsi, une traduction plus adaptée au terme anglais « efficient » serait, par exemple, « optimal ». Je terminerai sur ce mot en notant à nouveau que, même si leurs sens ont partiellement évolué au fil des siècles, les termes « efficient » et « effective » sont tous deux des emprunts directs au Vieux Français selon « etymonline.com ».

    La langue Française évolue, et elle en a besoin! Plutôt que s’offenser de l’emprunt de mots anglais dans notre vocabulaire, ne devrions-nous pas s’interroger sur sa capacité à générer naturellement des néologismes lorsque cela s’avère nécessaire? Si il est si mal vu de changer le sens de nos mots ou d’en forger de nouveaux, comment s’étonner que les locuteurs aillent se fournir ailleurs? Si l’anglais, une langue dont près de 30% du vocabulaire est d’origine française, est une menace, pourquoi ne pas chercher à comprendre sa formidable capacité d’adaptation au lieu de se plaindre? Est-il légitime d’attendre des francophones qu’ils patientent plusieurs années, souvent plus, avant qu’une autorité arbitraire, ni efficace, ni efficiente, appose son sceau sur de nouveaux usages? Pour quelles raisons politiques, linguistiques ou morales devrait-ton confier l’élaboration des règles et du vocabulaire Français à une certaine autoritlé au détriment de ses locuteurs et de la primauté de l’usage?

    Tant de questions (questions) qui non seulement (sol, solely) restent ouvertes, mais également trop peu débattues (debated) à mon goût… Loin de vouloir faire l’apologie (apology) de l’anglicisme, je suis déçu (deceived) d’entendre bien plus de complaintes (complaint) que de remarques (remarks) constructives (constructive) sur les possibilités (possibilities) d’adapter (adapt) avec efficience (efficient) les usages (us, usage) de notre langue (language).

    Comme vous l’aurez remarqué, les emprunts ne tuent pas une langue… mais une langue qui ne se donne pas les moyens d’évoluer pourrait bien devenir une langue mourante.

    Voilà c’est dit, mes pensées sont couchées 😉

  • 10/08/2019 à 23:32
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    Le souci avec « digital », c’est que ceux qui font l’erreur revendiquent que cela signifie la même chose que numérique et parfois même agressivement ^^’

  • 27/07/2019 à 17:01
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    sandwich = casse-croute
    J’ai bien ri avec le spécialiste en marketing digital => vendeur de doigts 🙂
    Si on essaie d’éviter « marketing » aussi, on va devoir dire : spécialiste en promotion numérique… ça fait évidemment moins « business », du coup c’est moins porteur, ça « impacte » moins son auditoire 😀

    • 27/07/2019 à 19:15
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      En vérité, à l’instar du mot « poubelle », « sandwich » vient du nom de l’homme qui l’a rendu populaire dans l’aristocratie anglaise : John Montagu, 4e Comte de Sandwich.
      Un sandwich désigne un mets particulier : deux tranches de pain, ou plus, entrelardées d’ingrédients alors que le terme de « casse-croute » désignait, à l’origine, le repas sommaire d’un ouvrier et pas seulement des sandwichs, mais aussi des restes de repas, des lamelles de viande séchée, des morceaux de fromage, du poisson séché ou encore des biscuits (comme en atteste la création des « casse-croute BN » de la Biscuiterie nantaise dès 1922).
      Si le sandwich est courant en Angleterre depuis le XVIe siècle, il ne s’est popularisé en France que vers 1830. « Casse-croute », quant à lui, n’a pris sa définition alimentaire qu’on lui connait aujourd’hui que vers la fin du XIXe siècle. Historiquement, le terme « sandwich » est donc arrivé avant, mais surtout, il désigne quelque chose de beaucoup plus précis qu’un « casse-croute », qui pouvait être à peu près n’importe quoi d’alimentaire. Ils ne sont d’ailleurs pas synonyme à l’heure actuelle, puisqu’un casse-croute désigne toujours un repas léger et pas seulement un sandwich (à savoir des ingrédients dans du pain).
      Il s’agit donc bien d’un emprunt et non d’un anglicisme 😉

      D’ailleurs, soit dit en passant, un « casse-croute » au Québec désigne ce que nous, Européens, appelons « snack-bar », ce qui n’est absolument pas l’équivalent d’un « sandwich ».

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